Les entreprises d’au moins 50 salariés ont depuis peu une nouvelle obligation liée à la formation et la gestion des carrières. D’une part, elles doivent réaliser avec chaque salarié, tous les deux ans, un entretien professionnel (distinct de l’entretien d’évaluation). D’autre part, elles doivent avoir fait bénéficier à chacun, sur une période de 6 ans, une formation « non obligatoire » (au sens de l’article L 6321-2 du code du travail) — une période transitoire était prévue jusqu’au 30 septembre 2021 ; elle permet à l’employeur de choisir une autre solution (voir le tableau ci-dessous).
Au bout de 6 ans de présence du salarié dans l’entreprise, l’employeur doit passer avec lui un entretien d’état des lieux qui permet de vérifier que le salarié a à la fois bénéficié des entretiens professionnels tous les deux ans et suivi la formation « non obligatoire » — cette règle de cumul fait toutefois débat ; il s’agit de la doctrine du ministère du travail, de l’emploi et de l’insertion dans son questions-réponses sur l’entretien professionnel mais elle contredit, selon la CNCC, une jurisprudence de la cour d’appel de Paris. En cas de manquement, l’employeur doit verser, à la caisse des dépôts et consignations, un abondement correctif au CPF (compte personnel de formation) de 3 000 euros par salarié concerné.
Abondement correctif ou non au CPF : quelques exemples
Entretien d’état des lieux réalisé avant le 1er octobre 2021 : 2 options au choix de l’employeur | |
Règle issue de la loi du 05/09/2018 (1) OU… | … Règle issue de la loi du 05/03/2014 |
Le salarié doit avoir bénéficié des entretiens professionnels tous les deux ans et d’au moins une formation autre qu’une formation «obligatoire» | Le salarié doit avoir bénéficié des entretiens professionnels tous les deux ans et au moins de deux des trois mesures suivantes : formation, acquisition d’éléments de certification et progression salariale ou professionnelle |
Exemple : Le salarié a bénéficié des 3 entretiens et d’au moins une formation non obligatoire : obligation respectée | Le salarié a bénéficié des 3 entretiens et de 2 des 3 mesures : formation, acquisition d’éléments de certification et progression salariale ou professionnelle : obligation respectée |
Le salarié a bénéficié de 2 entretiens sur les trois et d’au moins une formation non obligatoire : obligation non respectée | |
Le salarié a bénéficié des 3 entretiens mais d’aucune formation non obligatoire : obligation non respectée | |
Entretien d’état des lieux réalisé à compter du 1er octobre 2021 : seule la règle issue de la loi du 05/09/2018 est applicable |
Source : questions-réponses du ministère du travail, de l’emploi, et de l’insertion sur l’entretien professionnel (mise à jour du 17 mars 2022).
Période de 6 ans achevée à la date de clôture
Quel est le traitement comptable applicable à l’abondement (probable) correctif en cas de manquement des obligations de l’employeur (d’au moins 50 salariés) ? Dans une étude comptable qu’elle vient de diffuser (EC 2021-34), la CNCC distingue deux situations. Première situation, celle qui entraîne l’enregistrement d’une dette. « Au terme d’une période de 6 ans achevée à la date de clôture, la Commission considère qu’une dette doit être comptabilisée si l’entreprise constate qu’elle a manqué à l’une de ses obligations au cours de cette période, et qu’elle doit, en conséquence, auto-liquider un abondement correctif post-clôture, dans les délais prévus par la loi », développe la CNCC.
Période de 6 ans non achevée à la date de clôture
Deuxième situation : « au cours d’une période de 6 ans non achevée à la date de clôture, la Commission estime qu’une entreprise qui constate qu’elle n’a pas rempli une ou plusieurs de ses obligations (3 entretiens biennaux et une formation «non obligatoire») doit en tirer les conséquences comptables au premier manquement ». Conséquence : si les deux évènements futurs incertains sont probables (effectif d’au moins 50 salariés pendant la période requise et présence du salarié concerné au terme des 6 ans), il faut enregistrer une provision. Dans cette situation, deux options comptables se présentent : provisionner intégralement l’abondement correctif sur l’exercice au cours duquel le 1er manquement a été constaté ou étaler la provision sur la période résiduelle à compter de la date à laquelle le manquement a été constaté et jusqu’au terme de la période de 6 ans.